Rue du Tram
Assis le long d´la rue du tram, j´ai vu un noir
Jouer solo sur son tam-tam, faudrait pouvoir
S´accrocher à son oeil qui brille, comme ça en douce
Faire avec lui un tour en brousse
Sentir enfin sous mes pieds nus le long sentier
C´est un chemin de terre battue par les étés
Où quelques femmes portent l´eau tout en chantant
Un chant nouveau de plus de mille ans
Et passent les passants qui battent la semelle
Ce n´est pas pour le froid, mais sa musique est belle
Et moi, pendant ce temps, je sens pousser mes cernes
En usant mes journées aux emplois subalternes
Je devine un ancêtre en moi, vieil africain
Qui aimerait tant me voir en joie, tapant des mains
Tu dois mimer devant tes soeurs et tous tes frères
Le grand chasseur et la panthère
Je sens bruisser ce qui enserre mon tour de taille
C´est un habit de couleur claire, ceinture de paille
Et face à moi, cet animal tout en colère
Qui se régale d´avance à ma chaire
Et passent les passants qui battent la semelle
Ce n´est pas pour le froid, mais sa musique est belle
Et moi, pendant ce temps, je sens pousser mes cernes
En usant mes journées aux emplois subalternes
Je serais bien resté toujours dans ce village
À compter les lunes et les jours pendant des âges
Mais le son du tam-tam soudain s´est arrêté
Les magasins vont se fermer
Alors je remets pied à terre place du Molard
Tout autours de moi c´est l´hiver, froid de canard
Et pourtant pas un seul flocon, jamais de neige
Sur le Perron, tourne encore le manège